La lâcheté et le silence

Pour une certaine gauche juive, l’identité juive s’est construite sur le refus d’accepter la Shoah comme seule identité possible. Ils se sont tournés vers Israel comme refuge, image valorisante et rassurante de la condition juive. Aujourd’hui cette gauche sioniste est déchirée entre l’illusion et l’horrible réalité: son idéal est devenu le dernier état colonial d’origine (principalement) européenne.

Alors, il leur reste trois voies, aussi absurdes les unes que les autres:

– l’autisme qui engendre une panique permanente et renforce cet autisme. Car la moindre critique entame aisément cet équilibre fragile qui repose sur un déni du réel que tout rappelle.

– le support de “l’occident laic” (Pologne incluse ?) face au “péril” de l’islamisme. Comme si depuis 1919, les morts n’ont pas toujours été à 1.000 arabo-musulmans pour un “blanc”. Comme si Israel et les USA (et le reste de l’Otan) n’avaient soutenu, défendu, financé partout les religieux pour contrer le “commmunisme athée” de l’OLP ou de l’Afghanistan. Comme si l’islamisme avait plus de morts innocents sur la conscience que le c(h)rétinisme anglo-saxon, tant à l’échelle du siècle que des 8 dernières années.

– l’accusation sans fondement: “la gauche ne voit que les quelques morts à Gaza et se tait face à tous les autres massacres. C’est de l’anti-sémitisme caché”. Ah bon, la gauche ne s’est pas impliquée dans la lutte républicaine nord-irlandaise, même qu’elle soutenait déjà les “terroristes” de l’IRA au nom des 5 (cinq, pas mille) morts du “Bloody Sunday” ? Ah bon, la gauche n’a jamais dénoncé le colonialisme ? Ah bon, la gauche (y compris juive) n’a pas lutté contre le racisme anti-noirs aux USA ou en Afrique du Sud ? Ah bon, la gauche n’a jamais critiqué le massacre des indiens dans les amériques par les colons chrétiens d’Angleterre et d’Espagne (et plus si affinités) ? Ah bon, la gauche n’a pas manifesté contre Pinochet et ses émules ? Ah bon, la gauche ne s’est jamais engagée dans la résistance (parfois gesticulante, certes) à toutes les oppressions, en y laissant force morts (parfois de ridicule,certes) et assassinés ? Non, tous ces combats ont été menés et gagnés par Raymond Aron et Albert Camus ;-)

– et le plus absurde: le soutien au nom de la Shoah. Comme si cette horreur était radicalement différente de toutes celles qui l’ont précédée, suivie ou accompagnée. Pour en citer quelques’unes: le belge Leopold II a (fait) tuer 50 % de la population congolaise, la colonisation des amériques a tué 60 à 100 % de la population locale, l’Algérie Française (1 ou 2 millions de morts?) et tous les autres colonialismes, les marches de la mort pour les Arméniens turcs (assassinés par un pouvoir… laïc !), les froides tueries de Chinois lors de l’occupation japonaise, les slaves et tziganes par les nazis, etc….

Si toutes les survivants des génocides réclamaient un pays ethniquement pur, je crains qu’il ne ne nous faille bien plus qu’une 2e terre. Et si en plus, ils en tiraient argument pour ne pas respecter les lois de la guerre, alors, il faudrait souhaiter qu’on en revienne à l’âge de la pierre pour ne pas voir exploser notre verte boule.

Ceci posé, ne vous méprenez pas sur ma position: si l’existence des juifs, comme de tout groupe, était menacée, je n’hésiterai pas à prendre les armes, celles que je sais et que j’ose manier. Ce ne sont pas celles de la guerre. Mais je ne critiquerai jamais ceux qui ont le courage de prendre ce chemin. Même si c’est de la folie, car il y a pire que la folie: il y a la lâcheté et le silence.

Je remonte dans le texte, pour que ne le ratiez pas, le commentaire qui vient de m’être envoyé car je pense qu’il comble un manque dans ce que j’ai écrit:

“Il y a encore une autre figure… celle qui refuse de hurler avec les loups et qui sans nier l’inacceptable soutient désespérément toutes les initiatives porteuses d’espoir, de dialogue, d’humanité… Bref qui recherche simplement un peu de lumière dans un monde de brute …
Naïf peut-être …. mais j’assume”.

Lettre ouverte à un ami pro-israelien

Un ami vient de m’envoyer un courriel montrant des enfants, visiblement musulmans, en armes et les mettant en parallèle avec les photos d’enfants morts à Gaza. Le premier expliquant le second à ses yeux. Le tout accompagné du message “Il n’y a rien de pire que d’enseigner la haine à des enfants” “, “comme si dans le passé, nos propres organisations de lutte pour la création d’Israël n’avaient pas recruté des enfants” lui répond Gideon Lévy en anglais dans Haaretz

Mais je voudrais lui dire qu’il a tellement raison : les priver de soins, de vaccins, d’école, de nourriture voire même de vie ne sont que pêchés véniels à coté de l’enseignement de la haine. Et les terroriser, les priver d’avenir, tuer leurs proches n’est-il pas le plus fort des enseignements.

Cet ami me répondra qu’à la différence des terroristes (comprendre “non-occidentaux”), Israel ne vise pas spécifiquement des civils. Ouais… outre qu’au contraire, il est avéré que Tsahal tire volontairement sur les médecins et infirmiers, comme dit  le même Gideon Lévy en anglais dans Haaretz:The IDF has no mercy for the children in Gaza nursery schools (et ici en français) qui ajoute “on peut déclarer que le Hamas se cache parmi la population civile, comme si le ministère de la Défense israélien à Tel-Aviv n’était pas situé au cœur d’une population civile, comme s’il y avait des endroits dans la bande de Gaza qui n’étaient pas au cœur d’une population civile.”

Plus généralement, le message de cet ami semble indiquer qu’à ses yeux tous les musulmans ne sont qu’une seule “race”: des images d’enfant arabes ou turcs prises quelque part dans le monde justifient le massacre de civils dans un pays précis mais différent. Ma perception est accentuée par le raisonnement que je lui ai souvent entendu énoncer: que les Palestiniens chassés de leurs terres pouvaient n’avaient qu’à aller “ailleurs”, sous-entendu “dans le monde arabe” bien sûr. Pas en occident (URSS incluse) qui pourtant était le responsable de leur expatriation, voire même uniquement en Allemagne puisqu’en dernier ressort c’était quand même ce pays qui avait porté au pouvoir et soutenu jusqu’à l’écroulement de son rêve le fou responsable de la Shoah (et de la mort de 50% des Tziganes et de millions de civils slaves).

Autre chose, l’entrainement militaire des tout jeunes, montré sur ces photos n’est pas une preuve de “haine”, a fortiori anti-sémite. Et ici en europe, il n’y avait PAS un seul message anti-sémite à la manif de dimanche à Bruxelles que j’ai couverte de bout en bout. Et s’y proclamer “juif”, ce que je fais systématiquement face à des gens dont je veux tester l’anti-sémitisme (*), ne m’y a attiré aucun problème. Au contraire, cela m’a attiré la sympathie  d’un jeune d’origine marocain qui m’a accompagné pendant toute cette “inspection” et avec qui j’échangeais des traductions des rares slogans en arabe et l’identification des groupes arabes et turcs contre information sur les organisations de gauches représentées. Plus même, dans aucune des manifestations récentes dont j’ai lu les comptes-rendus, les journalistes n’ont signalés de slogans  racistes sauf pour ce qui concerne cette violente agression devant un lycée parisien, typique importation du conflit qui a eu “curieusement” peu d’écho dans la presse. Mais si vous vous donnez la peine d’aller lire l’article de cet excellent blogueur, vous comprendrez pourquoi même l’hyper-réactif Sakro en a aussi peu parlé.

Pour le reste, je voudrai le renvoyer à  ce texte sans haine publié sur le site de mon amie Danielle http://socio13.wordpress.com/2009/01/17/sermon-au-soldat-de-tsahal-par-dr-idrissi-my-ahmed/#comment-10204 et au commentaire que j’y ai ajouté.

Je voudrais aussi lui conseiller De Defensa qui reporte que même les alliés les plus fidèles d’Israel commencent à avoir des doutes sur la tactique sans stratégie d’Israel à Gaza. Mais il y bien plus sur ce site. Notamment “Un autre texte, du San Francisco Chronicle décrit combien la crise de Gaza divise également la communauté juive US, sans doute dans une mesure qui n’a pas de précédent. C’en devient presque inquiétant. Comme bien d’autres, je crains autant le soutien inconditionnel ancien qu’un retournement massif de la politique occidentale qui risque au contraire d’attiser la situation.

Enfin, je voudrais lui dire que sa position est aujourd’hui indéfendable. L’ONU se plaint du bombardement de son QG à Gaza et de l’incendie de son entrepôt de nourriturele Président de l’Assemblée générale de l’ONU accuse Israël de violer le droit international, MSF abonde dans le même sens (en audio), des organisations israeliennes appellent à une intervention humanitaire à Gaza. La liste est interminable. Même le drigeant du Hamas Israel Hanyieh ne pose pour la paix que des conditions aussi raisonnables qu’humaines, basés d’ailleurs sur des arguments repris par Courrier International: le blocus a commencé en 2006 qui rappelle aussi que la trève de 6 mois rompue cet hiver a été rompue d’abord par des attaques israeliennes et le refus de lever le blocus d’une population affamée.

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(*) de même que je me réclame de mon ascendance turque chaque fois que je rencontre un anti-musulman ou “suspecté de”. Je suis d’ailleurs reconnaissant à ce pays qui a contribué à sauver mes arrières-grands-parents de la déportation nazie, mais pas de la mort, hélas.

No comment

Oui, no comment. Non, je n’ecrit pas plus sur ce qui se passe à Gaza car… car… quoi. Je ne sais plus dire, plus parler. Alors juste quelques articles, sans commentaires, avec juste une citation pour vous inviter à les lire.

Juste une balance pour commencer: les roquettes parties de Gaza ont fait au total 20 morts juives en 9 ans et sur l’autre plateau selon l’Unicef, les quelque 840.000 enfants dans la bande de gaza ont besoin d’une aide humanitaire. Quand au très neutre Comité International de la Croix-Rouge il constate “l’armée israélienne n’assiste pas les blessés palestiniens”

Qui a raison ? Les faits et les chiffres selon CNN.

Vous avez la force pour vaincre, mais il faut avoir la raison pour convaincre.” Unamuno

“Israël affirme que des militants tiraient depuis l’école. Mais nous, aux Nations unies, sommes convaincus que ce n’est pas le cas car ces écoles sont sous notre contrôle” dit le responsable de l’ONU à Gaza.

Lorsqu’un Arabe, en proie à une fureur totale, ressentira contre l’Occident une colère aveugle et incendiaire, nous dirons que cela n’a rien à voir avec nous. Pourquoi donc nous haïssent-ils, allons-nous nous demander ? Ne prétendons pas que nous ne connaissons pas la réponse. Robert Fisk.

“Israel’s siege of Gaza began on 5 November, the day after an Israeli attack inside the strip” Sara Roy (BBC)

Nourrie, sans conteste, par l’expérience traumatisante de l’Holocauste, cette “narrative israélienne” (…)  conduit à une ivresse de la force et une apologie de la puissance”. Bichara Khader.

Gaza, le droit, la « disproportion » et les « barbares ». Alain Gresh

C’est la faute du Hamas !

Ils l’ont bien cherché“, voilà ce qu’on trouve à propos de la bande de Gaza dans la majorité des médias. Mais personne ne parle du quotidien de ce ghetto assiégé comme ce manager d’un hotel local interviewé par Silvia Cattori ou comme le Dr. Moustapha Baghouthi, secrétaire général de l’Inititative Nationale Palestinienne, parti politique laïc de gauche. Il est partisan d’une lutte non violente contre l’occupation israélienne.

“C’est la faute du Hamas”, mouais, mais comment un groupe étiqueté “religieux” comme le Hamas a-t-il pu attirer autant d’électeurs, majoritairement laics ?

Pour aider à comprendre ce qu’est véritablement le Hamas, je vous propose d’abord quelques extraits du dernier livre (VF) de Michel Warschawski mais aussi cette traduction française d’un article de William Sieghart (version anglaise) dans le vénérable et très britannique Times. Si vous vous sentez paresseux, la traduction commence par un bref résumé,  que je vous livre ci-dessous mais qui ne contient évidemment pas les arguments de l’article.

“Le poste de police de Gaza se trouvait parmi les premières cibles visées par Israël. Plusieurs dizaines de policiers, réunis pour une cérémonie de remise de diplômes, sont morts ce jour-là. William Sieghart, spécialiste de la résolution des conflits, alors en mission à Gaza, avait rencontré ces hommes une semaine plus tôt. « Etaient-ils de « dangereux miliciens armés du Hamas » ? Non, c’étaient des officiers de police non armés, agents de la fonction publique, qui ont été tué non pas dans un « camp d’entraînement de militants », mais dans [un] poste de police. » Pour Sieghart, ni Israël ni l’occident ne comprennent ce qu’est véritablement le Hamas, et comment il a pu rassembler 42% des électeurs. C’est l’échec du Fatah à obtenir un Etat Palistinien qui a fait le succès de ce mouvement. Son intransigeance, juge-t-il, nait d’une volonté de ne pas se laisser piéger comme le fut le mouvement d’Arafat, qui n’a pas su faire respecter les promesses faites à Oslo en échange de la reconnaissance d’Israël. Sieghart conclut pourtant sur une note optimiste. Il est toujours possible de dénouer une crise, rappelle-t-il, à condition d’accepter de s’asseoir sans préalable autour d’une table.”

Pour creuser le sujet, je vous conseille d’abord une réflexion sur la notion de “barbare” par Periphérie et le site de Michel Collon qui fait un “Spécial Gaza” qui notamment remonte jusqu’aux sources du conflit avec un article d’Henry CATTAN, le porte-parole du haut Comité arabe aux négociations à l’ONU de 1948. Celui-ci rappelle cette déclaration de David Ben Gourion, alors qu’il était Président de l’Agence juive dans son témoignage devant l’UNSCOP en 1947 (…) : “Les Arabes possèdent 94% de la terre, et les Juifs seulement 6%.” 6 % qui devriendront 57 % dans le plan de “partage” finalement adopté illégalement, selon le point de vue arabe, par l’ONU puis 100 % après 1967. Illégalement ou non, Israel n’a jamais osé reconnaître la compétence de la Cour Internationale de Justice.

Ah oui, et la collaboration de l’Egypte au blocus de Gaza. Robert Fisk (“le plus grand reporter britannitque” selon le New York Times) lui règle son compte : “L’Etat égyptien pourri est trop impuissant et corrompu pour agir“. On peut difficilement être plus clair sur la sujétion du régime de Moubarak aux USA.

Le consulat belge qui ne payait pas son loyer

Voilà un beau conte de Noël: la belle histoire d’un locataire qui va peut-être se retrouver à la rue pour défaut de paiement.

Ce n’est pas que les caisses de l’Etat belge soient vides ni que le Consul a détourné l’argent du loyer. Non, c’est simplement une histoire ubuesque et presque drôle qui illustre en quelques lignes la situation des palestiniens en Israël au travers des mésaventures de la représentation belge dans ce pays.

Ce teasing sera-t-il suffisant pour faire cliquer sur ce lien ?

Angélisme

Pour 2009, C.C.E. a décidé à l’unanimité d’offrir le Grand Prix de l’Angélisme 2008 à Maria Stephan et Erika Chenoweth pour leur travail « Why civil resistance works. The strategic logic of nonviolent conflit ».

Que disent ces deux chercheuses ? Que « les campagnes de lutte non violentes ont été couronnées de succès dans 53 % des cas, contre 26 % seulement pour les campagnes de résistance violente». C”est vrai que je ne me suis pas appuyé la lecture intégrale de leur recheche (en anglais, je vous le rappelle) qui est résumée en français mais je constate en première analyse que leur étude pourtant extensive a des bornes énormes. Et que ces bornes sont la perception occidentale, c’est à dire du pouvoir dominant, des enjeux de la lutte.

Je vais prendre l’exemple de 3 des génocides qu’à connu le siècle dernier. Aucun ne s’est attaqué à des populations en lutte. Ni les Arméniens en Turquie, ni les Juifs et les tziganes en Europe nazie, ni les Tutsi n’étaient des gens ou des groupes pratiquant la violence. Et ils ont eu lieu, c’est indéniable.

Autre exemple, deux régions qui sont souvent analysées sur C.C.E. parce que je les connais un peu moins mal que le reste: l’Amérique Latine et le Proche-Orient.

L’Amérique Latine a connu 30 ans de dictatures militaires particulièrement sanguinaires et sans scrupules. Comme dans tous les régimes avant les dictatures, au Chili post-Allende, en Colombie pré-Uribe, l’opposition était civile, syndicale, non-violente et organisée. Les (para-)militaires ont tué, torturé, massacré sans état d’âme des dizaines voire des centaines de milliers d’activistes, de simples suspects et leurs famille dans l’impunité, si pas l’indifférence, la plus totale et avec la bénédiction des USA. Les résistances paysannes, non-violentes, sont massacrées par les para-militaires recrutés par les propriétaires latifundaires dans les mêmes conditions de quasi-silence médiatique.

Je ne parle même pas des populations indigènes, majoritairement non-violentes, qui sont massacrées aux Amériques depuis Pizarre sans que personne ne s’en aperçoive avant qu’il n’en reste plus qu’un pourcentage dérisoire, parfois inférieur à 1%. En Amérique Latine, les luttes civiles et électorales récentes n’ont permis de prendre le pouvoir qu’au moment où les USA ont chancelé en interne. Et elles ne tiennent que parce que cette puissance dominante est temporairement hypnotisée par ses bourbiers irakien et afghan. Et je crains que ce ne soit que pour ce temps seulement, si ce n’est déjà fini comme tente de le démontrer cet article de mondialisation.ca.

Au Moyen-Orient, le sort des Palestiniens n’a commencé à intéresser l’occident obnubilé par sa culpabilité directe ou indirecte dans le génocide juif qu’à partir du moment où des avions remplis de blancs ont été détournés. Bien sûr pour critiquer ces affreux terroristes. Mais au moins en parlant enfin d’eux. La plupart du temps, les Palestiniens ont enduré leur sort sans réaction violente. Les deux Intifida ont démarrées quand l’oppression israelienne est devenue particulièrement insupportable ou provocatrice. La prise du pouvoir du Hamas à Gaza a eu lieu au moment où les puissances (directement ou indirectement) occupantes s’apprêtaient à fournir des armes à leurs collaborateurs qui avaient été battus par les urnes. Et vraisemblablement pas pour décorer leur salon.

Les exemples de réussites de luttes civiles citées par l’étude ne sont pas innocentes: “Serbie (en 2000), à Madagascar (en 2002), en Géorgie (en 2003), en Ukraine (en 2004-2005), au Liban (en 2005) et au Népal (en 2006)”, dans la majorité des cas, les réussites allaient dans le sens voulu par le pouvoir mondial dominant et au moment où l’ancien pouvoir dominant régional, l’URSS dans la plupart des cas, avait disparu. Et ce n’est pas un hasard.

Même l’icône de la non-violence, Gandhi, n’a réussi en Inde que quand fonctionnait à plein régime le moteur de la décolonisation voulue par la nouvelle puissance montante pour chasser les européens du monde qu’ils occupaient et que le libéralisme voulait asservir à leur place.

Je ne dis pas que la violence est la seule solution, ni même la meilleure, loin de là. Je dis seulement que face au racisme (et c’est en cela qu’il est vicieux), face au fascisme (et c’est en cela qu’il est particulièrement haïssable), face au colonialisme qui réfute l’humanité des populations qu’il exploite, croire en la non-violence, c’est de l’angélisme. Pire, c’est culpabiliser et discréditer des luttes armées qui sont parfois la seule voie face à des pouvoirs que le sort de leurs victimes indiffère, la seule voie face à un pouvoir mondial dominant que leur sort indiffère tout autant.

Que ce pouvoir dominant soit actuellement étatsunien ne le rend ni pire ni meilleur que les précédents ou les suivants. Pour affirmer cela, je m’appuye sur l’expérience antérieure des dominations européennes et japonaise qui sous le manteau de la colonisation ont massacré dans l’indifférence et des proportions qui ramènent le génocide rwandais au niveau d’une farce estudiantine. Seul un monde multi-polaire, écologiste ET socialiste changera peut-être quelque chose à cela.

Alors, violence ou non-violence ? Je pense que ce n’est pas à nous de juger. Je pense que ce choix appartient aux peuples, aux groupes opprimés et pas à nous. Nous devrions limiter notre voix à appuyer, ou non, ces luttes. Je nous trouverais bien effrontés de jouer les donneurs de leçons auprès de gens qui sont souvent opprimés, par personnes interposées, par nos propres pays. Et les exemples que j’ai cités montrent clairement que certains bourreaux ne reculent devant aucune atrocité.

Au moins la leçon de ghetto de Varsovie nous a appris cela: on ne lutte pas contre les bouchers en se conduisant comme des moutons. Mais en restant des humains, debout, fièrement. Et les armes à la main si nécessaire. Pensons-y pendant que nous accusons de terrorisme ceux qui (nous) résistent pendant que nous ou seïdes les volons, les affamons, les empêchons de se soigner, de s’éduquer et de travailler. Ou plus simplement dit: de vivre, tout simplement.

Mise à jour: actuellement se déroulent en Thailande des luttes non-violentes pour le pouvoir. La première manche a été gagnée par les pro-libéraux, les jaunes. Aujourd’hui les rouges, issus des campagnes, copient leurs moyens d’actions et leur revendication d’élections anticipées. Les premiers avaitent été bien traités dans nos médias et par la police. On va bien voir si le même traitement sera accordés aux seconds. Personnellement, j’en doute pour toutes les raisons évoquées ci-dessus.

La société de consommation pour les nuls

Oubliez Australia, c’est un flop. Voici LA vidéo que vous devez avoir vu pour être éternellement jeune, intelligent et sexy. Elle existait déjà mais en américain seulement (ce qui explique l’actuelle domination du monde par les anglo-saxons 😉 )

LA voici avec des sous-titres en F-R-A-N-C-A-I-S.

Asseyez-vous, regardez-LA et vous ne verrez plus jamais le monde tout à fait de la m€m€ même façon.

Voici “La société de consommation pour les nuls” 🙂

Et si la vidéo vous a plu, je vous conseille la lecture des “Neufs urgences d’une révolution tranquille” qui est parue sur Hebdo.ch, l’hebdo de référence de la Suisse francophone.

Plus ça continue, plus c’est la même chose

Tout le monde a vu aujourd’hui comment Israel voulant “donner une leçon” aux Gazaouites bombarde et tue “collatérallement” des enfants. Collatérallement ou pas, ces morts sont volontaires car on ne bombarde pas une zone aussi densément peuplée que Gaza sans accepter de tuer aussi des civils. Il faudra aussi noter pour le futur que de viser explicitement et de tuer des policiers ce n’est pas du terrorisme, du moment qu’on n’est pas d’accord avec le régime qu’ils servent. Mais il faut probablement le faire depuis un avion pour que ce soit un fait héroîque.

Comme l’UJFP, je pense que l’Europe par le “rehaussement” de sa collaboration avec Israel porte une lourde responsabilité dans le déclenchement des hostilités. Je parle bien de déclenchement car il n’y a aucune mesure commune entre quelques roquettes artisanales qui n’avaient tué personne et les centaines de morts que nous comptons déjà du côté palestinien.

Par contre, je grogne sérieusement quand Michel Collon que nous avons déjà vu plus inspiré emploie lors d’une émission sur FR3 (1) le terme “camp de concentration” à propos de l’emprisonnement des Palestiniens. Il s’agit peut-être d’un “génocide lent” comme le déclare l’historien israelien aujourd’hui exilé, Ilan Pape. Il s’agit effectivement d’une “getthoisation” de la population palestienne. Il s’agit surement d’une situation contraire à tous les traités internationaux et au plus élémentaire respect de la personne humaine. Mais le terme me semble trop chargé affectivement pour être utilisé à la légère et il me semble qu’on est loin en Palestine de l’extermination de millions de gens. Maintenant, peut-être était-ce un simple dérapage verbal dans le feu d’une discussion.

Enfin, j’attire votre attention sur autre billet d’Ilan Pape, cité sur le site du même Michel Collon, qui démonte beaucoup d’idées reçues sur la naissance d’Israël et mérite donc d’être lu, ne fut-ce que pour s’ouvrir l’esprit.

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(1) oui je sais, l’émission de FR3 commence par un débat sans intérêt entre un supporter de Sakro et un laudateur du même mais bon, vous baissez le son, vous laissez passer 5 minutes et vous avez ensuite un superbe aperçu sur la prochaine politique US au Moyen-Orient avec notamment Robert Baer, ancien patron de la CIA, qui bouscule aussi certaines idées reçues. Oui, je sais aussi que la CIA c’est pas dans nos sources habituelles mais ça n’empêche pas de les écouter, surtout quand ils critiquent leur propre pouvoir ou qu’ils dévoilent leur idéologie.

Danielle se tait ? Non !

Disparait Reparait aujourd’hui (*)  de la blogosphère une de ses voix les plus puissantes et les plus originales. Chouette cadeau de noel 🙁

Lassée de la bétise, lassée de la méchanceté, lassée de prêcher dans ce qu’elle voit à tort comme un désert, victime de son succès qui lui amenait nombre de mails haineux, Danielle Bleitrach a avait décidé de fermer “Changement de société” alias “soci013”.

Où d’autre lirons-nous désormais cette traduction de l’intervention de Dick Cheney sur ABC où il reconnaissait explicitement avoir autorisé la torture dont je parlais dans mon article précédent ?

Où d’autre lirons-nous les nombreux articles sur l’amérique latine, là où la gauche devrait aller chercher ses nouveaux modèles après l’échec sanglant de sa gestion du capitalisme ?

Où d’autre lirons-nous les analyses politiques et philosophiques fondamentales, profondes et orginales que nous apportait Danielle ? Sans langue de bois, sans concessions, elle nous apportait un contenu d’une rare profondeur. Evidemment, cette profondeur n’allait pas sans une certaine longueur qui décourageait ceux qui ne consacrent pas plus de 2 minutes à un texte. Ce qui amenait des remarques acerbes de sa part quand quelqu’un prenait la parole en omettant un élément dont elle avait parlé.

Où d’autre lirons-nous la critique féroce de l’exploitation, de l’asservissement ?

Où trouverons-nous encore une voix juive, aussi féroce dans sa critique d’Israel que de l’anti-sémitisme qu’elle a vécu dans son corps et qui a marqué prfondément son esprit.

Ou trouverons-nous encore cette foi dans l’internationalisme socialiste ? Cette analyse marxiste qui avait annoncé la crise et fournit un des rares moyen d’en sortir ?

Ailleurs, difficilement, moins bien. Nul(le) n’est indispensable, certaines voix sont simplement encore plus irremplaçables que d’autres. Danielle est de celles-là. Je pleure.

Elle annonce un livre, je revis et je ne manquerai de vous en faire part 🙂

(*) Mise à jour: Ce matin 1e janvier, Danielle a rouvert son blog 🙂  Du coup J’ai corrigé certains aspects de ce post, dont le titre.