Sous le titre « Géométrie variable » le blog « Les doigts dans la crise » s’interroge sur le battage médiatique qui a accompagné le maladroit voyage récent de quelques parlementaires régionaux.
J’ajouterai à ses réflexions que nombre d’entreprises et d’administrations publiques font la même chose sous les dénominations de séminaires de cadres, incentives (il y a même des sociétés spécialisées dans la création de ceux-ci), etc… sans qu’on ne crie à l’abus de biens sociaux.
Quand la loterie nationale fut « autonomisée » ou quelqu’autre jargon utilisé pour décrire le fait qu’elle a été débarassée de la tutelle des règles administrative, le premier acte de son conseil d’administration fût de se voter un méga-augmentation de salaire, sans déclencher plus qu’un haussement d’épaule.
J’ai le souvenir d’un SPF où le fonctionnaire dirigeant (un copernicien, évidemment) faisait faire ses courses privées par son chauffeur et sur les notes de frais de son administration. Les autres cadres coperniciens étaient plus discrets mais le plafond autorisé de quelques milliers d’€ par personne et par trimestre était atteint ou effleuré par tous à chaque fois.
Dans les sociétés privées, l’abus de biens sociaux est frôlé (« frôlé »: ils ont des juristes pour faire vérifier ça) en permanence par la quasi-totalité du haut management, même en période de licenciements massifs. Et je ne parle pas des seuls parachutes dorés qui ne sont que la partie émergée de l’iceberg.
Alors pourquoi cette fois-ci ? Pourquoi et par qui le buzz a-t-il été lancé et pourquoi a-t-il pris ? Peut-être l’atmosphère de crise peut-être aiguisé la sensibilité de nos citoyens mais j’ai le souvenir d’un récent évènement de grand luxe pour le management d’une Fortis fraichement subventionnée qui n’avait pas causé tant de réactions, même si la presse en avait (un peu) parlé. Ben, si on en a tant parlé, c’est peut-être à cause de ça.
Pour une certaine gauche juive, l’identité juive s’est construite sur le refus d’accepter la Shoah comme seule identité possible. Ils se sont tournés vers Israel comme refuge, image valorisante et rassurante de la condition juive. Aujourd’hui cette gauche sioniste est déchirée entre l’illusion et l’horrible réalité: son idéal est devenu le dernier état colonial d’origine (principalement) européenne.
Alors, il leur reste trois voies, aussi absurdes les unes que les autres:
– l’autisme qui engendre une panique permanente et renforce cet autisme. Car la moindre critique entame aisément cet équilibre fragile qui repose sur un déni du réel que tout rappelle.
– le support de “l’occident laic” (Pologne incluse ?) face au “péril” de l’islamisme. Comme si depuis 1919, les morts n’ont pas toujours été à 1.000 arabo-musulmans pour un “blanc”. Comme si Israel et les USA (et le reste de l’Otan) n’avaient soutenu, défendu, financé partout les religieux pour contrer le “commmunisme athée” de l’OLP ou de l’Afghanistan. Comme si l’islamisme avait plus de morts innocents sur la conscience que le c(h)rétinisme anglo-saxon, tant à l’échelle du siècle que des 8 dernières années.
– l’accusation sans fondement: “la gauche ne voit que les quelques morts à Gaza et se tait face à tous les autres massacres. C’est de l’anti-sémitisme caché”. Ah bon, la gauche ne s’est pas impliquée dans la lutte républicaine nord-irlandaise, même qu’elle soutenait déjà les “terroristes” de l’IRA au nom des 5 (cinq, pas mille) morts du “Bloody Sunday” ? Ah bon, la gauche n’a jamais dénoncé le colonialisme ? Ah bon, la gauche (y compris juive) n’a pas lutté contre le racisme anti-noirs aux USA ou en Afrique du Sud ? Ah bon, la gauche n’a jamais critiqué le massacre des indiens dans les amériques par les colons chrétiens d’Angleterre et d’Espagne (et plus si affinités) ? Ah bon, la gauche n’a pas manifesté contre Pinochet et ses émules ? Ah bon, la gauche ne s’est jamais engagée dans la résistance (parfois gesticulante, certes) à toutes les oppressions, en y laissant force morts (parfois de ridicule,certes) et assassinés ? Non, tous ces combats ont été menés et gagnés par Raymond Aron et Albert Camus
– et le plus absurde: le soutien au nom de la Shoah. Comme si cette horreur était radicalement différente de toutes celles qui l’ont précédée, suivie ou accompagnée. Pour en citer quelques’unes: le belge Leopold II a (fait) tuer 50 % de la population congolaise, la colonisation des amériques a tué 60 à 100 % de la population locale, l’Algérie Française (1 ou 2 millions de morts?) et tous les autres colonialismes, les marches de la mort pour les Arméniens turcs (assassinés par un pouvoir… laïc !), les froides tueries de Chinois lors de l’occupation japonaise, les slaves et tziganes par les nazis, etc….
Si toutes les survivants des génocides réclamaient un pays ethniquement pur, je crains qu’il ne ne nous faille bien plus qu’une 2e terre. Et si en plus, ils en tiraient argument pour ne pas respecter les lois de la guerre, alors, il faudrait souhaiter qu’on en revienne à l’âge de la pierre pour ne pas voir exploser notre verte boule.
Ceci posé, ne vous méprenez pas sur ma position: si l’existence des juifs, comme de tout groupe, était menacée, je n’hésiterai pas à prendre les armes, celles que je sais et que j’ose manier. Ce ne sont pas celles de la guerre. Mais je ne critiquerai jamais ceux qui ont le courage de prendre ce chemin. Même si c’est de la folie, car il y a pire que la folie: il y a la lâcheté et le silence.
Je remonte dans le texte, pour que ne le ratiez pas, le commentaire qui vient de m’être envoyé car je pense qu’il comble un manque dans ce que j’ai écrit:
« Il y a encore une autre figure… celle qui refuse de hurler avec les loups et qui sans nier l’inacceptable soutient désespérément toutes les initiatives porteuses d’espoir, de dialogue, d’humanité… Bref qui recherche simplement un peu de lumière dans un monde de brute …
Naïf peut-être …. mais j’assume ».